Lauréate de l’EUPL (Prix de Littérature de l’Union Européenne) en 2021, Laura Vinogradova, qui commencé à écrire à la trentaine, alterne romans ou nouvelles pour adultes et littérature jeunesse.
L'épisode 1 de ce making-of graphique nous emmenait aux sources même de l'écriture de Putain de vies ! de Muriel Douru. La suite, avec l'approche de la technique même, plonge au plus près des mots et du déroulé du roman graphique
2. L'écriture / le dessin
Comment avez-vous mis en images les propos, choisi d’accentuer tel ou tel élément du discours relaté par une case ?
J’ai fait attention que chaque témoignage « apporte » quelque chose aux autres donc j’ai privilégié la singularité de chacun… tout en pensant à la globalité du livre. Je n’ai jamais perdu de vue, pendant la réalisation de ce travail, que l’objet final serait un livre et que je devais donc intéresser le lecteur, sans trahir la témoin pour autant ! Après, chaque témoignage est tellement fort qu’il se suffit à lui-même, je trouve. J’ai souvent pensé, en quittant les témoins, que chaque histoire pourrait être la matrice d’un scénario de film et que la « matière » du livre était intense, quelque soit ma réalisation graphique et la qualité, ou pas, de mon travail.
Avez-vous des rituels de travail ? Lesquels ? Comment sont ils venus ?
Je n’ai pas de « rituels » mais je suis très rigoureuse et même si je suis indépendante- sans patron pour m’obliger à quitter mon lit !- je m’astreins à des rythmes de journée « bureaucratiques » (9h-18h). Après, j’ai largement dépassé ces horaires pour réaliser ce projet puisque j’ai souvent travaillé jusque tard dans la soirée et tous mes samedis les 3 derniers mois.
Combien de temps avez-vous mis à composer cet album ?
Un an et demi mais ça laisse à penser que j’ai travaillé non-stop sur ce projet pendant un an et demi or ce n’est pas le cas. Certes, la masse de travail était importante puisque je faisais tout (de la rencontre des témoins à la rédaction des scénarios jusqu’à la création des illustrations) mais comme les auteurs/autrices de BD ne sont pas payé.e.s à la hauteur du travail fourni, ils et elles doivent accepter d’autres projets en cours de route, ce qui a allongé mon temps de réalisation. C’est surtout dans les dernières semaines, quand la date de sortie approche, que la pression monte et qu’on n’a quasiment plus de vie hors celle passée devant l’écran de l’ordinateur ! ☺
Au niveau du travail éditorial post « manuscrit », comment l’éditeur vous a-t-il fait travailler cet album ?
Une fois que Médecins du monde m’a proposé ce projet, je me suis chargée de trouver un éditeur et le moins que l’on puisse dire c’est que, si tous s’entendaient sur le fait que le sujet était très « fort », ils n’étaient pas tous prêts à l’assumer. Donc je remercie Vincent de La Boîte à Bulles de l’avoir soutenu. D’autant que quand je lui ai proposé, il ne me connaissait pas et il pouvait douter de ce que je ferai de cette « matière » car étant une ex-dessinatrice textile, fraichement arrivée dans le monde de la BD, je n’ai pas qu’une seule façon de dessiner, et aucun de mes livres ne ressemble à un autre… ce qui n’est pas très confortable pour un éditeur !
Ensuite, il a été présent tout en me laissant mon indépendance artistique ce qui était très agréable. Il a surtout apporté son expérience éditoriale en mettant le doigt sur des incohérences ou des incompréhensions qu’il trouvait parfois dans mes scénarios.
à suivre...